Fallou Dieng : « je suis satisfait de ma carrière parce que je l’ai géré dignement »

Depuis la sortie de son album « Momé Vent », Fallou Dieng ne cesse de faire l’actualité. Trouvé dans sa demeure sise à Ouest Foire et sobrement habillé, l’interprète de « »Askanou Laobé » a reçu l’équipe de votre site préféré pour un entretien à bâtons rompus. Toujours égal à lui-même, Fallou nous conte ses 25 ans de carrière ponctuée par des hauts et des bas. Et en véritable patriarche, il prodigue des conseils aux jeunes musiciens.


Après tant d’années dans la musique, quelle appréciation faites vous de votre carrière ?
Bon, je remercie le bon Dieu puisque j’ai mené ma carrière tout seul. Et forcément il y’aura des hauts et des bas parce que j’ai été le précurseur de la deuxième génération de musiciens. Il n’y avait que les grands lors de mes débuts dans la musique et j’ai été le premier de ma génération à créer un groupe et sur ce j’ai rencontré toutes sortes de difficultés. Globalement je peux dire que je suis satisfait de ma carrière parce que je l’ai géré dignement. En plus j’ai fait ce que je devais faire pour mon peuple, j’ai œuvré durement pour que les mélomanes et le peuple sénégalais s’en souviennent toujours.

Malgré l’ambiance de mes chansons, j’ai développé des thèmes qui touchent directement le peuple sénégalais alliant l’éducation et le travail, en faisant plaisir aux gens qui m’aiment. J’ai une totale satisfaction de cette carrière puisque les gens parlent aujourd’hui de mes 25 ans de carrière, ce n’est pas donné à n’importe qui. Je remercie encore le bon Dieu qui m’a insufflé la force, la santé, le courage, les idées et la capacité de pouvoir la gérer ainsi. Il y a eu des hauts et des bas tout comme des moments de bonheur et d’autres très difficiles. Tout le monde sait qu’une carrière n’est pas facile d’autant plus que vous n’attendez le soutien de personne encore moins les sponsors sauf si ce n’est Dieu et ta volonté personnelle. Ce n’est pas du tout facile surtout si on n’est pas né dans une famille de griots, c’est pourquoi je m’étais armé de courage et de force pour en arriver là aujourd’hui.

Effectivement vous avez fait 25 ans de carrière musicale avec des productions, mais pourquoi ce long silence qui, à la limite, commençait à frustrer les mélomanes et vos fans surtout ?
Si c’est vrai et je l’expliquais lors de ma conférence de presse. Je disais que c’est vrai que les gens ne me voyaient plus, ils ont dit quatre ans mais c’est depuis que « Mana » sorti en 2009. « Mana » a fait son cheminement et a eu une durée de promo que doit durer une production. Et j’y ai travaillé énormément depuis sa sortie en 2009. Jusqu’en 2012 il faisait du tabac, je suis allé à des tournées nationales comme internationales avec. Les gens m’ont perdu de vue en un moment donné, et c’est vrai qu’après la promotion de « Mana », je voulais créer un autre groupe qui s’appelle « Fallou Folk » et qui n’a rien à voir avec Fallou Dieng et le DLC. Et lorsque je l’ai entamé avec Madou Diabaté, c’était pour enrichir mon expérience musicale et montrer une autre facette de moi différente de celle du mbalax que l’on me reconnait. Je me suis dit il faut que j’élargisse ma musique et c’est dans ce cadre que j’ai vu Madou et qu’on a commencé à travailler ensemble.

J’ai crée « Fallou Folk » pour une musique acoustique et moderne et je pense que cette musique fait aussi partie de la musique sénégalaise. On a commencé à jouer dans beaucoup de milieux after-work dès notre entame et le succès était au rendez-vous. Nous avions projeté de sortir un album acoustique de 10 titres que j’ai déjà même enregistré avec Madou mais malheureusement il nous a quittés, Madou est décédé et j’ai tout mis entre les mais de Dieu en mettant ce produit de côté. C’est pourquoi les gens ne savaient pas où j’étais et ce que je faisais. Mais malgré cela je travaillais et les gens me demandaient pourquoi j’ai laissé tomber le mbalax. Aussi, une rumeur circulait à Dakar disant que j’ai arrêté la musique, J’ai fait ceci, j’ai fait cela alors que si je devais quitter la musique c’est moi qui l’annoncerait mais tel n’est pas le cas. J’ai repris mon travail et c’est là que j’ai entamé le projet de l’album « Momé Vent » et depuis je travaille sur l’album et je l’ai bouclé depuis l’année dernière. J’écoutais simplement les gens pour pouvoir le sortir le moment opportun.

Crédits photo : Pochette album

Pourquoi le titre « Momé Vent » ?
Vous savez les gens me reconnaissent à travers des slogans parce que si vous regardez de très prés, des slogans sont nés à presque chaque sortie de mes albums. Depuis « Withiakhou », « Biri Biri », « Wékh Beut », « Samba Soura Bali », « Mana » jusqu’à « Laobé ». Sur ce point Dieu m’aide beaucoup et l’album contient un ou deux morceaux qui sont des hits, c’est-à-dire des tubes. « Momé Vent » et Pourquoi « Momé Vent » ? C’est une affaire que j’ai tiré de ma jeunesse. Lorsqu’on était gamin et quant on jouait au football dans les rues pour faire le tirage, on soulevait du sable, et pour choisir, l’une des équipes disait que le vent lui appartenait. C’est ce que j’ai pris pour le positiver pour dire qu’on peut aujourd’hui être en position de force et l’autre en position de faiblesse.

Donc toute célébrité ou celui qui est au sommet de sa gloire simplement doit se mettre dans la tête que s’il est aujourd’hui en position de force, Dieu peut retourner les choses demain. Mais aussi si on est célèbre aujourd’hui, il faut s’attendre à ne plus l’être sous peu de temps. Je l’ai commencé par moi même et c’est un thème moral très instructif par rapport aux gens célèbres, à ceux qui sont à l’abri du besoin et ceux qui détiennent les pouvoirs publics. J’ai eu l’idée depuis 2012 qui sonne une ère nouvelle chez moi. Comme vous le constatez, il y a eu beaucoup de changements pas seulement au Sénégal mais partout ailleurs dans le monde entier.

Le clip et l’album éponyme « Momé Vent » sont sortis, est ce qu’on peut s’attendre à d’autres vidéos ?
Bien sur que oui, nous sommes dans un élan de promo extraordinaire, d’ailleurs j’en profite pour remercier tous les sites de musique, comme le votre, Senemusic, que j’apprécie beaucoup parce que vous êtes entrain de promouvoir la musique sénégalaise et nos célébrités. Franchement nous saluons et encourageons cette initiative que vous faites pour promouvoir la musique sénégalaise. Nous nous préparons à faire d’autres vidéos pour bien promouvoir l’album d’ici le ramadan. D’ailleurs j’ai commencé à joué dans différents lieux pour mes fans à Dakar et je joue régulièrement chaque vendredi au Mirador. Tout ceci entre dans le cadre de la promotion. Nous entamerons une tournée nationale après le ramadan. Nous irons dans les régions et un peu partout au Sénégal, et ce sera Fallou Dieng et le DLC. Et d’ici peut être le mois de septembre, le mois d’octobre ou de novembre, on va entamer une tournée internationale.

Regardez le clip « Momé Vent » :

Ceux qui connaissent Fallou Dieng savent qu’il apprécie les slogans, mais aussi ses albums sont toujours accompagnés par des pas de danse. On a vu « Thionthie »…
(Rires) C’est vrai ! Khatarayou », « Withiakhou », « Watatou », « Thiourpi-thiourpi », « Mana », « Laobé ».

Aujourd’hui c’est « Compas » qui est à la mode.
C’est ce que les gens disent et je pense qu’il s’écarte bien.

Mais d’où puisez-vous toute cette inspiration ?
Tout ça c’est parce que l’inspiration me vient de la société sénégalaise elle-même, en plus j’ai beaucoup d’amis et il m’arrive même de sortir et de se fondre dans la masse pour en savoir plus sur ses choses là. Vous savez tout est entre les mains des gens et quand vous les fréquentez, ils vous inspirent à travers des mots qu’ils utilisent dans leur discussion sans s’en rendre compte. Par exemple, chaque jour que Dieu fait, quelqu’un parle de « Mana » en n’y faisant même pas attention. Ce sont des mots ou des slogans que je retiens par cœur comme ça. Et lors des conversations, je me tais pour pouvoir retenir quelque chose de négative et la positiver. Je remercie vraiment le bon Dieu qui m’a doté cette capacité de création parce que les gens me parlent souvent de reprendre mes anciennes chansons, mais tant que j’ai la force et la capacité d’innover et de sortir quelque chose de nouveau je le ferai.

Mais est ce que ce n’est pas à cause de cela qu’on vous a surnommé le maréchal de l’ambiance ?
Bon vous savez, moi, je ne sais même pas danser mais ce sont mes préparatifs qui font que les gens me croient un grand danseur mais non. En plus l’ambiance ne vient pas de la danse mais plutôt de la musique que je fais. Mais aussi, quand je suis sur scène et devant mon public je me donne à fond. Je fais le maximum pour être au même niveau que mon public pour qu’il n’y ait pas de limite entre nous, c’est ce qui a donné naissance à l’ambiance. Je l’ai fait pendant de nombreuses années et c’est ce qui m’a valu le titre du « Roi de l’ambiance », « Chef d’état major général des ambianceurs », « Maréchal »… On m’a donné n’importe quel surnom par rapport à ça. Je crois tout simplement que le public sénégalais m’a adopté par rapport à cette forme de musique.

On sait que votre milieu est un milieu très difficile et vous l’avez dit, vous avez fait 25 ans de carrière, vous êtes de la deuxième génération et vous êtes le premier à mettre sur pied un groupe. Quels conseils donneriez-vous aux jeunes, pour faire 25 ans de carrière comme vous ?
Je leur dirai tout simplement que la musique n’est ni un ou deux jours, encore moins une carrière. Il faut qu’ils fassent doucement, qu’ils persévèrent et qu’ils soient patients parce qu’ils sont appelés tôt tard à prendre la relève. Qu’on le veuille ou pas l’avenir appartient à la jeunesse et nous, on a été jeune. Si on est là aujourd’hui c’est parce qu’on a eu de bons conseillers qui nous ont donné des coups de mains un certain moment. La personne ne se suffit à elle seule pour aller de l’avant. Donc elle a besoin du concours d’autres gens pour aller au sommet et s’y maintenir.

Donc il leur faut des conseils de la part des aînés car le succès peut changer radicalement l’individu. On peut avoir le succès au début de sa carrière et le perdre à la fin comme on peut ne pas l’avoir au début mais à la fin. On peut citer l’exemple de Cesaria Evora qui a eu du succès tardivement et personnellement je pense que c’est mieux ainsi parce qu’étant jeune on n’est pas mature, et des lobbies tapis dans l’ombre peuvent profiter de ta naïveté et ils ne le comprendront que tardivement. Ce sont justes ses erreurs là que je constate qu’ils peuvent les éviter en faisant doucement pour leur carrière, en demandant des conseils. Maintenant Dieu est là pour tout le monde. Qu’Il veille sur eux pour qu’ils fassent de riches carrières parce que c’est la musique sénégalaise qui y gagne.

Crédits photo : DR

Comme vous le remarquez actuellement c’est le Grand Théâtre qui est à la mode et pratiquement tous les artistes y vont. Est ce que Fallou Dieng est aujourd’hui prêt à s’y produire ?
Non, moi, je pense qu’on doit dépasser même le Grand Théâtre. Quand vous allez dans les pays limitrophes du Sénégal, vous y trouverez des salles de 4000 places qui dépassent de loin le Grand Théâtre. J’ai vu la salle Hampâté Bâ de Bamako au Mali, celle de la Guinée Conakry qui est une grande salle mais aussi la salle d’Abidjan en Côte d’Ivoire qui est une salle de 6000 places. Je crois que c’est le « Grand » qui fait que les gens la mettent au dessus des autres mais il y a des salles plus grandes qu’elle en termes de places dans la sous-région.

Moi, je pense que c’est bien, il faut être ambitieux. C’est une nouvelle salle qui permet aux fans de découvrir quelque chose de nouveau. Comme on dit ce n’est pas une scène de vérité parce que la véritable scène de vérité c’est Daniel Sorano, parce que les plus grands artistes y ont joué. Aujourd’hui, très sincèrement, je pense les défis et les ambitions doivent même dépasser le Grand Théâtre National. Il y a là le stade Demba Diop et d’autres. Selon moi les générations passées ont rempli des stades et de très grandes salles. Je pense que la tendance est le Grand Théâtre mais franchement ce n’est pas mon objectif.

J’ai lu dans une interview que la première dame Mariéme Faye Sall est votre amie. Qu’en est-il exactement de vos relations avec le couple présidentiel ?
C’est une relation de frère et de sœur qui existe entre la première dame Mariéme Faye Sall et moi. Je les ai connus bien avant qu’ils ne soient là où ils sont aujourd’hui. Mariéme est une sœur d’abord, ensuite une amie, et le président Macky est lui, aussi mon ami. Ce n’est ni une relation de quelque nature que se soit, encore moins politique mais une amitié. J’ai joué plusieurs fois pour Macky à Fatick et j’allais souvent chez eux pour leur rendre une visite de courtoisie. Vous savez Marième est une dame généreuse et c’est un fan à moi. Ce qui a le plus solidifié nos rapports, c’est que j’avais sorti à l’époque une chanson qui s’intitulait « Kolëré » et Mariéme en avait fait sa chanson préférée. Et en plus de ça, elle en a fait aussi sa sonnerie de portable.

Bref c’est des relations naturelles qui me lient avec eux donc si je fais un hommage à Macky, ce n’est pas pour lui seul mais j’y rend hommage à tous mes amis et il en fait partie. Donc son excellence le président Macky, je prie pour que Dieu lui donne la force de réaliser ses vœux pour notre cher pays et c’est la même prière que je formule pour tous mes amis. En tant qu’artiste, quand on fait une production et on dédie un morceau à ses amis c’est pour leur rendre hommage et c’est ce que j’ai fait.

Propos recueillis par Cogito

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